En cet après-midi du 23 février, dans son bureau du ministère des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, les traits tirés et le verbe haut, tente de transformer une déroute en victoire. N'a-t-il pas fait adopter au cours de la nuit dernière au Sénat une loi portant création de l'Institut français, cette grande agence culturelle qui s'inspire du British Council de nos voisins anglais? N'est-ce pas, aux yeux de la classe politique de droite comme de gauche, l'outil indispensable à toute restauration de notre influence culturelle à l'étranger en grave perte de vitesse ? « Tout le monde en parle depuis vingt ans et moi, je l'ai fait », s'enthousiasme le ministre. Certes, mais alors pourquoi le sénateur de la majorité UMP Louis Duvernois se déclare-t-il « déçu », et son collègue le sénateur socialiste Yves Dauge parle-t-il de « coquille vide » ? Pourquoi l'académicien et ambassadeur au Sénégal Jean-Christophe Rufin, l'ami de longue date de Bernard Kouchner, pressenti pour diriger cette agence baptisée Institut français, a-t-il finalement décliné l'offre ? Un « dégonflé », maugrée Kouchner, qui balaie la dérobade d'un revers de main en assurant disposer d'une autre « personnalité charismatique » prête à « relever le défi ». Pour connaître son nom, il faudra attendre la confirmation de cette loi par le vote de l'Assemblée nationale (1). Patience, donc.