Madame la ministre, je sais que vous connaissez bien les Français de l'étranger et que vous leur accordez beaucoup d'attention. Vous avez d'ailleurs toute leur sympathie.
Permettez-moi de profiter de ce débat pour attirer votre attention sur une catégorie d'élus autre que celle dont a parlé avec talent mon collègue et ami Jean Puech, mais qui s'en approche beaucoup.
Pourquoi un sénateur des Français de l'étranger intervient-il ce soir à cette tribune ? Mon intervention a pour objet de faire en sorte que les conseillers élus à l'Assemblée des Français de l'étranger, AFE, ne soient pas oubliés dans ce débat.
Certains objecteront que mon intervention est hors sujet...et prétendront que les conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger ne peuvent pas être assimilés à des élus locaux. Pourtant, il me faut souligner qu'ils sont très proches de leurs collègues élus sur le territoire national, qu'il s'agisse de la nécessité de reconnaître leur statut, lequel n'existe encore ni pour les uns ni pour les autres, ou de l'organiser.
Au nombre de 155, ces élus forment l'Assemblée des Français de l'étranger. Ils sont élus localement, au sein de circonscriptions électorales, au suffrage universel direct pour un mandat de six ans. Il existe, vous le constatez, de nombreuses similitudes !
J'ai été élu pendant plus de dix ans par les Français d'Autriche et des pays de l'Europe de l'Est, et je sais que les responsabilités qui découlent d'un tel mandat sont bien réelles.
À l'instar des élus locaux, les élus de l'Assemblée des Français de l'étranger ont des responsabilités envers leurs administrés. Ils les remplissent notamment en participant aux réunions des diverses commissions dans les ambassades, dans les consulats, pour l'attribution de bourses scolaires, l'aide sociale, les comités pour l'emploi ou les comités de sécurité - qui sont de plus en plus importants à notre époque pour nos communautés expatriées - ou encore aux réunions avec les consuls, les consuls honoraires de la circonscription, etc. Madame le ministre, ayant été ministre de la défense, vous connaissez bien les difficultés liées à la sécurité des Français à l'étranger et le rôle des chefs d'îlot.
Les conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger agissent localement sur le terrain, un terrain bien plus vaste et très souvent beaucoup plus périlleux que celui sur lequel évoluent leurs collègues de France. Il ne faut pas oublier que certaines circonscriptions regroupent parfois plusieurs pays. On comprend alors combien il est difficile pour les élus d'accomplir leur mission auprès des Français de l'étranger, leurs mandants.
Ces élus se réunissent deux fois par an à Paris en session plénière ; ils travaillent au sein de commissions sur les problèmes de nos compatriotes établis hors de France. Mais ils prennent sur leur temps libre, temps de loisirs et de congés, pour exercer leur mandat.
Les élections sont politiques. Il suffit, pour s'en convaincre, de rappeler que les conseillers élus à l'AFE parrainent les candidats au premier tour de l'élection présidentielle. Ils forment également le collège électoral des sénateurs représentant les Français de l'étranger. Ils ont donc bien un rôle politique.
Pour pouvoir exercer ce mandat, les élus à l'AFE perçoivent une indemnité. Celle-ci est insuffisante pour la plupart d'entre eux, même si elle a le mérite d'avoir été augmentée récemment. Bien sûr, elle est encore loin d'être suffisante pour permettre aux élus d'exercer leur mandat dans la circonscription.
Ce qui manque le plus à ces derniers, c'est, à l'image des élus locaux de France, un statut pour une reconnaissance de leur mandat. Madame la ministre, il ne s'agit pas seulement de valoriser un travail difficile ; il s'agit surtout de le rendre plus efficace et surtout de le reconnaître.
En effet, la principale difficulté rencontrée localement par les conseillers élus est l'absence de reconnaissance de leur mandat et de leur rôle d'élu, lesquels ne sont pas toujours bien perçus par notre administration diplomatique et consulaire. Je n'accuse personne, mais celle-ci a trop souvent tendance à les considérer comme des élus de « second ordre », je serais même tenté de dire comme des « élus au rabais ». L'administration oublie qu'ils ont été élus au suffrage universel.
La définition d'un véritable statut d'élu des Français de l'étranger permettrait aussi de régler certains problèmes concrets.
Je prendrai l'exemple de leur protection sociale. Les élus ne sont assurés que lorsqu'ils se rendent à Paris pour siéger à l'Assemblée des Français de l'étranger. On connaît les dangers à Paris ; ils ne sont pas si terribles que cela ! En revanche, les élus ne sont pas assurés dans leur circonscription lors de déplacements effectués dans l'exercice de leur mandat, dans des conditions parfois très difficiles, quand elles ne sont pas dangereuses. Pourtant, c'est surtout au cours de tels déplacements qu'ils devraient être protégés.
Madame la ministre, mes chers collègues, voilà pourquoi, avec ces élus de l'étranger, je souhaite que la création d'un régime statutaire spécifique, comme le disait Jean Puech, adapté aux nouvelles responsabilités des exécutifs locaux permette également la création d'un statut spécifique de l'élu à l'Assemblée des Français de l'étranger.
On souhaite l'émancipation de la démocratie locale. On veut une démocratie moderne et décentralisée. Alors, allons jusqu'au bout et incluons un statut spécifique pour ces élus d'outre-frontières ! Ils le méritent bien, et ce ne serait que leur rendre justice... Comme l'a dit Jean Puech, n'ayons pas, pour les Français de l'étranger aussi, une République de retard ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur les travées du RDE et les travées socialistes.)
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