Pas
contents mais alors pas contents du tout, nos compatriotes de l’étranger. Alors
que le Tout-Paris de la politique, des médias et d’ailleurs est déjà dans les
starting blocks, prêt à se ruer sur le plantureux buffet de la garden-party de
l’Elysée, dans nos lointaines délégations, on s’apprête à faire vache maigre le
14 juillet prochain. Et ça chiffonne quelques élus.
Jour de carême pour les amis de l’hexagone… un
comble puisque qu’il s’agit de célébrer la République. Pour le 14 juillet, la
fête nationale, ordre a été donné à nos ambassades et consulats de réduire de
« façon substantielle » le budget alloué à la réception de la
fête nationale. C’est le résultat d’une décision prise en février dernier par
notre sémillant ministre des Affaires Etrangères, Bernard Kouchner, sur fond de
rigueur budgétaire.
Kouchner avait alors livré en prime le mode
d’emploi pour parvenir à ce serrage de ceinture. Il s’agit de limiter l’accès
aux réjouissances à quelques happy few, élus, représentants des associations
françaises et à certaines personnalités. Cette « calamiteuse circulaire »,
selon les mots d’un élu indigné, a provoqué un tollé et une véritable levée de
bouclier, notamment au sein de la communauté des français de l’étranger, et en
particulier parmi les 12 sénateurs les représentants.
En attestent divers courriers outrés dont Bakchich a pu prendre connaissance. L’un d’entre eux, posté de Pékin le 20 juin dernier par Francis Nizet, conseiller à l’Assemblée des Français de l’Etranger, interpelle directement le chef de l’État. C’est que l’affaire est grave.
Et notre Français du bout du monde d’attirer
l’attention de Nicolas Sarkozy sur « l’ émoi », « la
consternation et le désarroi unanime de nos compatriotes comprenant mal qu’on
veuille les priver, pour la plupart, de la seule occasion annuelle de se
retrouver et de fêter ce grand rendez-vous républicain. » Le monsieur
n’y va pas avec le dos de la cuillère.
À la lecture de ce même courrier on apprend
toutefois que, face aux protestations, le ministre des Affaires étrangères
avait fait savoir en mai « qu’il ne s’agissait là que d’une décision un
peu hâtive et qu’une autre circulaire rectificative serait envoyée aux postes,
leur demandant de conserver le format des années précédentes ». Hélas,
il semble bien que la circulaire rectificative se soit égarée entre Bogota et
la Mamounia…
« La circulaire rectificative n’est jamais
parvenue aux postes, lesquels, en l’absence de nouvelles consignes, se
préparent à organiser une célébration a minima. Cette restriction sera, sans
nul doute, extrêmement mal perçue », assure ainsi François Nizet au président de la
République dont il entreprend (sur le mode lyrique) au passage de rafraîchir
quelque peu la mémoire. L’Élysée et le Quai d’Orsay n’ont qu’à bien se tenir
face à la grogne de l’Assemblée des Français de l’Étranger qui trouve là une
bonne occasion de se faire remarquer. Il n’est jamais trop tard…
Ainsi, écrit l’élu : « Lors de votre
visite à Pékin, en novembre dernier, près de deux mille Français étaient venus
à votre rencontre. Votre discours a été ovationné et s’est clos par une
Marseillaise bruyamment reprise par une foule enthousiaste. » Voilà
Sarko bien averti. Lors de son prochain voyage à Pékin pour les jeux l’accueil
de la communauté, la « foule » des privés de buffet, pourrait se
montrer moins « enthousiaste ».
Il
ne reste plus qu’à regarder TV5
Kouchner lui aussi a eu droit à sa petite lettre
(avec copie secrétaire général adjoint de l’UMP, Dominique Paillé ( visiblement
en charge des Français de l’étranger). Un courrier au ton fort peu diplomatique
puisqu’intitulé « Touchez pas à mon 14 juillet » et assorti de
fines allusions aux responsabilités de Mme Kouchner,c’est-à-dire Christine
Ockrent, directrice générale de l’audiovisuel extérieur, pour porter la voix de
la France aux quatre coins du globe… Oh, les basses attaques.
Ainsi : « En effet, la fête du 14
juillet, fête populaire par essence, est à l’étranger la seule véritable
occasion de l’année pour l’ensemble de la communauté française de se retrouver
et de croiser le personnel diplomatique et consulaire. La consigne donnée aux
postes de trier sur le volet les invités et de ne garder pour les ripailles que
les personnalités les plus « représentatives » risque en effet d’être
extrêmement mal vécue par tous ceux, sans culottes ou pas, qui resteront aux
grilles du château. Il ne leur restera peut-être plus alors qu’à regagner leur
chaumière pour regarder, par la petite lucarne de TV5 si jamais ils reçoivent
cette chaîne, le défilé militaire sur les Champs. Piètre façon pour eux de
célébrer leur Fête Nationale ».
Privés de buffet, voire de retransmission du défilé
sur la CNN à la française, on ne peut que compatir à la dure condition
d’expatriés. Nos lecteurs du bout de monde se consoleront avec Bakchich
dont l’accès, sauf en Tunisie, est assuré aux quatre coins de la planète.
Commentaires