Le député Thierry Mariani, Député et Secrétaire National pour les Français de l'Etranger à l'UMP, défendait récemment son amendement qui finalement n'a pas été retenu mais avec la promesse de revenir sur la question.
M. Thierry Mariani. Dès 1970,
l’assurance chômage a prévu le maintien de la protection sociale des salariés
expatriés face au risque du chômage. Une de nos collègues vient de parler de
l’outre-mer ; je souhaite pour ma part évoquer l’amendement qui concerne
les deux millions de Français expatriés.
Le GARP, Groupement des ASSEDIC de la région
parisienne, a été mandaté pour assurer une gestion centralisée de ce
dispositif, depuis l’affiliation jusqu’à l’étude en vue d’une ouverture de
droits. Une gestion nominative de l’affiliation et du recouvrement a été mise
en place dès sa création. À ce titre, le GARP effectue donc l’affiliation, le
renseignement du passé professionnel, le recouvrement, l’étude et le calcul des
droits à indemnisation. Ces activités constituent un processus intégré qui
garantit la sécurisation et la qualité des données.
Le présent projet semble remettre en cause ce
processus par le transfert aux URSSAF du recouvrement des contributions. Or les
URSSAF n’ont pas compétence pour effectuer le recouvrement des cotisations
sociales pour les salariés expatriés. Ce recouvrement par les URSSAF des
contributions dues par les employeurs conduirait à remettre en cause le
processus existant de gestion nominative et de lutte contre la fraude.
Permettez-moi de vous rappeler en quelques mots le
contexte réglementaire de l’expatriation en dehors de l’Espace économique
européen et de la Suisse.
Au rebours de la sécurité sociale qui n’oblige pas
les employeurs à assurer leurs salariés expatriés, l’assurance chômage est
obligatoire si l’entreprise est établie en France. La participation est en
effet obligatoire pour tout salarié expatrié français, Suisse ou ressortissant
de l’Espace économique européen. Les consulats et les ambassades de la Suisse
et des États membres de l’EEE situés en France sont également concernés par
cette affiliation obligatoire. Elle est en revanche facultative si l’entreprise
est établie en dehors d’un État membre de l’EEE ou de la Suisse. À défaut
d’affiliation par l’employeur, les salariés concernés ont la possibilité
d’adhérer à titre individuel. Or les URSSAF procèdent à la collecte des
cotisations sur la base d’une assiette salariale globale.
La gestion centralisée par le GARP présente quant à
elle bon nombre d’atouts : c’est un interlocuteur unique pour une
population spécifique en termes de mobilité professionnelle et géographique, de
qualifications et de spécialisations, de réglementation applicable dans les pays
d’accueil et, enfin, d’écoute des problèmes liés à l’éloignement géographique.
Cette gestion centralisée constitue aussi un
instrument de prévention contre la fraude grâce à un traitement nominatif des
dossiers des adhérents dès l’affiliation, le croisement des fichiers
entreprises-salariés permettant le rattachement des salariés couverts par
entreprise, le contrôle du respect des obligations contributives et
déclaratives comme condition à une indemnisation.
Il convient donc de maintenir la spécificité de la
couverture assurance chômage des salariés expatriés privés d’emploi.
La gestion de la couverture de l’assurance chômage
des salariés expatriés représente, en 2007, 4 100 entreprises affiliées,
35 000 salariés couverts, dont 7 500 à titre facultatif, et
1 400 études de droit aux prestations.
Cette richesse a été clairement exprimée en mars et
avril derniers par Nicolas Sarkozy alors candidat à l’élection présidentielle.
Il affirmait alors, madame la ministre, dans une
lettre adressée aux Français de l’étranger, que « le renforcement du lien
entre la République et nos expatriés doit s’opérer dans tous les domaines de la
vie quotidienne ». Son souhait était très clair : que notre réseau
français soit davantage au service de nos expatriés et que leurs démarches
soient simplifiées, afin qu’ils puissent plus aisément faire valoir leur droit.
Il poursuivait en réfutant l’idée que nos expatriés
sont des privilégiés qu’il faut à tout prix chercher à punir ! Bien au
contraire, il affirmait la continuité de l’aide sociale à son niveau actuel.
Notre dispositif se doit ainsi de continuer de s’améliorer, notamment en ce qui
concerne la rigueur de gestion, pour améliorer la prise en charge dont nos
expatriés ont besoin.
À titre d’indication, une enquête a été menée en novembre 2007
auprès d’un échantillon représentatif d’entreprises françaises sur la gestion
centralisée menée actuellement par le GARP. Il en ressort, madame la ministre,
une satisfaction globale de 92,6 %, satisfaction portant notamment sur les
relations téléphoniques, les échanges par courrier électronique, les réponses
aux réclamations.
Pourquoi, dès lors, modifier un système qui
fonctionne pour une population très déterminée ?
Cet amendement a ainsi pour objet de maintenir une
gestion centralisée de cette couverture assurance chômage, gestion qui restera
confiée à la nouvelle institution issue de la fusion de l’ANPE et des ASSEDIC
pour tous les salariés embauchés hors de France pouvant bénéficier d’une
couverture assurance chômage en application des dispositions spécifiques
afférentes à la réglementation des expatriés.
Cette institution doit conserver la maîtrise de
cette activité de bout en bout : affiliation, recouvrement, alimentation
du passé professionnel du salarié en relation avec l’entreprise, étude et
calcul des droits à indemnisation.
Voilà pourquoi, madame la ministre, je défendrai
tout à l’heure un amendement visant à ce que ce processus intégré reste géré
par une seule entité.
Les deux millions de Français installés à
l’étranger constituent, nous le savons – et vous le savez, madame la
ministre, puisque vous avez été ministre du commerce extérieur, et que vous
êtes allée de nombreuses fois à leur rencontre –, un indéniable facteur
d’échanges, un atout dans un monde de plus en plus interdépendant. Nos
expatriés participent pleinement à l’influence et au rayonnement de la France.
On ne peut leur nier ces ressources et avantages.
Reprenant les termes de notre Président de la
République, je dirai, pour finir, que la France doit penser à ses expatriés de
la même façon qu’ils pensent à elle.
C’est pourquoi, une fois encore, je vous demande de soutenir l’amendement que je défendrai dans quelques minutes. Il est simplement ici question de logique, de reconnaissance, et de justice pour une population très particulière.
Cet amendement, je le répète, concerne
deux millions de Français expatriés.
Je crois savoir, madame la ministre, que vous avez
eu un débat au Sénat avec la sénatrice Joëlle Garriaud-Maylam et le sénateur
Jean-Pierre Cantegrit, qui représentent les Français de l’étranger.
Les deux associations qui les représentent par
ailleurs, l’ADFE, plutôt proche de nos amis socialistes, et l’UFE, qui est bien
sûr indépendante et proche de nous (Sourires),
ont les mêmes préoccupations.
Cet amendement a pour objet, je le répète, de
maintenir une gestion centralisée de la couverture d’assurance chômage des
salariés expatriés privés d’emploi. Elle serait confiée à la nouvelle
institution pour tous les salariés embauchés hors de France pouvant bénéficier
d’une couverture assurance chômage en application des dispositions spécifiques
afférentes à la réglementation des expatriés.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la
commission ?
M. Dominique Tian, rapporteur. Nous aurions bien aimé faire
plaisir à M. Mariani. Mais très franchement, la commission a examiné les
choses de très près, s’est rapproché du ministère – je pense que ce sera
confirmé –, et ne voit pas le problème technique qui justifierait
l’adoption de votre amendement, monsieur Mariani. Il y a peut-être un problème
politique, encore que je ne voie pas lequel.
Ne compliquons pas les choses. L’esprit de ce texte
est d’aller vers la simplification. Quand il y a des problèmes techniques – le
cas de Saint-Pierre-et-Miquelon, ou encore la MSA –, le Sénat ou nous-mêmes les
prenons en compte. Mais, en l’occurrence, nous ne voyons pas du tout le
problème technique qui se poserait.
Mme la présidente. L’avis de la commission est
donc défavorable.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la ministre de l’économie, des finances et
de l’emploi. Je suis évidemment sensible au problème que soulève cet
amendement. Je connais bien ces matières, pour les avoir un peu vécues
moi-même.
Je voudrais demander, monsieur Mariani, d’avoir
l’obligeance de bien vouloir retirer votre amendement. L’assujettissement et,
bien plus encore, le paiement des indemnités aux salariés expatriés de manière
générale, sont des sujets qui posent un certain nombre de questions que je
souhaiterais voir abordées lors de la conférence qui se tiendra au printemps.
En effet, un rendez-vous assurance chômage se tiendra avant l’ouverture de la
négociation sur la prochaine convention d’assurance chômage.
Je crois souhaitable de traiter en même temps la
question du paiement des cotisations, celle de la collecte des cotisations et
des organismes appropriés, en France et hors de France, ainsi que celle de la
fraude. Elles nécessitent, s’agissant des expatriés, un traitement global.
C’est au bénéfice de cette proposition que je vous
fais que je vous suggère, monsieur Mariani, de retirer cet amendement. Il ne me
semble traiter qu’une partie du problème, qu’il faut gérer dans son ensemble.
Mme la présidente. Retirez-vous l’amendement
n° 215, monsieur Mariani ?
M. Thierry Mariani. Madame la
ministre, je veux bien le retirer.
Je répondrai à notre rapporteur que ce que
changerait le texte actuel s’il était maintenu, c’est le régime de la
centralisation. Aujourd’hui, un seul organisme gère la totalité des expatriés,
quel que soit leur département d’origine et quelle que soit leur situation. Si
j’ai bien compris le texte, et d’après ce qu’ont aussi compris les associations
représentant les Français établis hors de France, ce ne serait plus le cas si
l’article n’était pas amendé dans le sens que je propose.
Cela dit, vous évoquez la prochaine conférence,
madame la ministre. J’en prends acte, et je retire mon amendement, en espérant
que l’on tiendra bien compte de cette situation spécifique, je le répète, qui
est celle de nos concitoyens établis hors de France.
Mme la présidente. L’amendement n° 215
est retiré.
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