La France et la Corée sont liées par la convention bilatérale d'entraide judiciaire en matière pénale du 2 mars 1995. Les deux pays sont également Parties à la convention du Conseil de l'Europe du 21 mars 1983 sur le transfèrement des personnes condamnées à laquelle la Corée a adhéré le 1er novembre 2005.
Pour compléter le dispositif conventionnel dans le domaine pénal, la France et la Corée ont souhaité se doter d'une convention bilatérale d'extradition. Une unique session de négociations en février 2006 a permis d'agréer le texte d'une convention sur la base d'un projet présenté par la Corée en 2005. La présente convention bilatérale d'extradition a été signée à Paris le 6 juin 2006 à l'occasion de la visite officielle en France du Premier ministre coréen dans le cadre du 120ème anniversaire de l'ouverture des relations diplomatiques entre les deux pays. Les autorités coréennes ont notifié le 13 décembre 2006 l'accomplissement de leurs procédures constitutionnelles requises pour la mise en vigueur de cette convention.
En préambule, il est rappelé que la convention, qui comporte vingt articles, vise à faciliter la procédure d'extradition entre les deux États pour rendre plus efficace leur coopération dans la prévention et la lutte contre la criminalité.
L'article 1er pose le principe général selon lequel les deux Parties s'engagent à se livrer réciproquement toute personne réclamée par l'autre Partie afin d'y être poursuivie, jugée ou pour y exécuter une peine.
Les paragraphes 1, 2 et 3 de l'article 2 posent le principe de la double incrimination et déterminent le champ d'application de la convention en fonction de la peine encourue. Pour que l'extradition puisse être accordée, il faut que les infractions qui motivent la demande soient punies d'une peine d'emprisonnement d'au moins deux ans. Lorsque l'extradition est demandée en vue de l'exécution d'un jugement, outre la condition relative au quantum de la peine encourue, la partie de la peine restant à exécuter doit être d'au moins six mois. Ces dispositions visent à réserver la mise en oeuvre de la procédure d'extradition, lourde et coûteuse, aux affaires présentant un enjeu suffisant. Le paragraphe 3 précise que la notion de double incrimination n'exige pas que l'infraction soit classée dans la même catégorie ou désignée de manière identique ou encore que ses éléments constitutifs soient identiques dans la législation pénale des deux États. Le paragraphe 4 inclut expressément les infractions fiscales, douanières ou de change dans le champ d'application rationae materiae de la convention. Enfin, en cas de demande fondée sur plusieurs faits distincts, le seul fait que certains d'entre eux soient punis de peines inférieures aux seuils fixés n'interdit pas à l'État requis, aux termes du paragraphe 5, d'accorder l'extradition pour ces faits.
Les articles 3 à 6 portent sur les motifs de refus, obligatoires ou facultatifs, de l'extradition.
L'article 3 traite des motifs obligatoires de refus. Il pose ainsi, la règle traditionnelle du droit français de l'extradition qui interdit que celle-ci puisse être accordée lorsque l'infraction motivant la demande est considérée par l'État requis comme une infraction politique ou comme un fait connexe à une telle infraction. Il est cependant précisé que la qualification politique de l'infraction ne concerne ni les attentats ou tentatives d'attentat contre la vie d'un chef d'État ou de Gouvernement ou contre un membre de leur famille, ni les infractions pour lesquelles une convention multilatérale à laquelle les deux États sont Parties fait obligation d'accorder l'extradition. En outre, cet article précise, très classiquement, que l'extradition ne sera pas accordée si la personne réclamée a fait l'objet d'un jugement définitif dans la Partie requise ou si les poursuites ou la condamnation sont prescrites. Elle ne sera pas non plus accordée si l'État requis dispose d'éléments tendant à montrer que la demande est motivée par des considérations liées à la race, la religion, la nationalité ou les opinions politiques de la personne réclamée, s'il s'agit d'une infraction purement militaire ou si la personne réclamée est poursuivie devant un tribunal d'exception ou si l'extradition est demandée pour l'exécution d'une condamnation prononcée par un tel tribunal.
L'article 4 traite du cas particulier de la peine de mort en indiquant que l'extradition pourra ne pas être accordée si la peine de mort est encourue à moins que des garanties suffisantes soient données par la Partie requérante que celle-ci ne sera pas prononcée ou si elle l'est, qu'elle ne sera pas exécutée. Le paragraphe 2 insiste sur cette garantie en faisant obligation à la Partie requérante de ne pas exécuter la condamnation à la peine capitale dans le cas où elle serait prononcée.
L'article 5 énumère les motifs facultatifs de refus de l'extradition. Un refus peut être opposé lorsque :
- l'infraction motivant la demande d'extradition a été commise en tout ou partie sur le territoire de l'État requis ou en un lieu assimilé à son territoire ;
- l'infraction a été commise hors du territoire de l'État requérant et la législation de l'État requis n'autorise pas la poursuite de ce type d'infractions commises en dehors de son territoire ;
- la personne réclamée fait déjà l'objet de poursuites de la part de l'État requis pour les mêmes faits que ceux motivant la demande d'extradition ou ces poursuites ont été abandonnées ;
- la Partie requise a décidé de ne pas engager de poursuites, ou d'y mettre fin, à l'encontre de la personne réclamée au titre de l'infraction pour laquelle l'extradition est demandée ;
- la personne réclamée a déjà été condamnée, acquittée ou relaxée par un État tiers pour la ou les infractions motivant la demande d'extradition ;
- la remise de la personne réclamée aurait pour celle-ci des conséquences d'une exceptionnelle gravité.
L'article 6 autorise les Parties à ne pas extrader leurs nationaux, étant précisé que la qualité de national est appréciée à la date de la commission de l'infraction qui motive la demande. Mais l'État requis doit, dès lors que l'extradition a été refusée pour ce seul motif, soumettre l'affaire à ses autorités compétentes pour l'exercice de l'action pénale, si l'État requérant le lui demande.
L'article 7 précise les règles de forme et de procédure qui doivent être respectées lors de la présentation d'une demande d'extradition : celle-ci, présentée par écrit, transite par le canal diplomatique et doit être accompagnée du signalement de la personne réclamée, d'un exposé des faits concernant l'affaire, du texte des dispositions légales applicables décrivant l'infraction et sa qualification ainsi que celles prévoyant les peines relatives à l'infraction. Lorsque l'extradition est demandée aux fins d'exécution d'une peine prononcée par l'État requérant, le dossier de demande doit être complété par la production d'une copie du jugement précisant le quantum de la peine restant à purger et d'une copie du mandat d'arrêt. Enfin, un signalement aussi précis que possible de la personne réclamée, les renseignements attestant son identité, sa nationalité et, éventuellement, sa localisation doivent être également fournis. Les paragraphes 5 et 6 précisent que les documents présentés doivent être accompagnés d'une traduction mais sont dispensés de légalisation dès lors qu'ils sont transmis par la voie diplomatique ou directement entre les ministères de la justice.
En cas d'urgence, dans l'hypothèse où l'État requérant ne disposerait pas des éléments nécessaires pour présenter sa demande d'extradition, l'article 8 lui permet, à titre préventif, de demander l'arrestation provisoire de la personne recherchée, à condition de fournir un minimum d'informations, notamment sur le signalement et la localisation de la personne réclamée, ainsi que l'exposé des faits et la description des lois enfreintes. La demande d'arrestation provisoire, formulée par tout autre moyen laissant une trace écrite, peut être transmise par le canal diplomatique ou directement entre les ministères de la justice. Si l'État requis n'est pas saisi d'une demande d'extradition en bonne et due forme dans un délai de quarante-cinq jours l'arrestation provisoire prend fin. La mise en liberté ne remet pas en cause la possibilité d'une mise en oeuvre ultérieure de la procédure d'extradition.
Si l'État requis s'estime insuffisamment informé, l'article 9 lui permet d'exiger un complément d'information et de fixer un délai, prorogeable si l'État requérant en fait la demande dûment motivée, pour l'obtention de ces informations supplémentaires. À l'expiration du délai, si la personne a été arrêtée, elle peut être remise en liberté, sans que cela empêche l'État requérant de présenter une nouvelle demande d'extradition de cette personne.
L'article 10 énumère les critères à prendre en compte pour déterminer l'ordre de priorité en cas de concours de requêtes.
L'article 11 fait obligation à l'État requis d'informer rapidement l'État requérant des suites qu'il entend réserver à la demande d'extradition, étant précisé que tout refus, total ou partiel, doit être motivé.
Les modalités de remise de la personne réclamée sont précisées à l'article 12. Hormis les cas de force majeure, si cette remise n'a pu être effectuée à la date fixée, la personne réclamée peut être libérée à l'expiration d'un délai de trente jours.
Lorsque la personne réclamée est poursuivie ou a été condamnée par l'État requis pour des faits autres que ceux motivant la demande d'extradition, cet État peut, aux termes de l'article 13, soit ajourner la remise, soit la remettre temporairement à l'État requérant, selon des modalités à définir entre les deux Parties.
Aux termes de l'article 14, tous les biens provenant d'une infraction peuvent, sous réserve des droits des tiers, être remis à l'État requérant avec la personne extradée, à condition que la législation de l'État requis le prévoie.
L'article 15 pose le principe, fondamental en matière d'extradition, de la spécialité des poursuites. L'État requérant ne peut tirer profit de la présence de l'extradé sur son territoire pour le poursuivre, le juger ou le détenir pour des faits antérieurs et différents de ceux pour lesquels l'extradition a été accordée, sauf exceptions limitativement énumérées. En cas de modification de la qualification légale de l'infraction pour laquelle une personne a été extradée, cette personne ne peut être poursuivie ou jugée que si l'infraction nouvellement qualifiée vise les mêmes faits que ceux qui ont conduit à l'extradition et n'est pas punie d'une peine d'un maximum supérieur à celui prévu pour l'infraction initialement qualifiée.
La réextradition vers un État tiers recherchant la personne extradée pour des faits antérieurs à la remise est, aux termes du paragraphe 2, subordonnée au consentement de l'État ayant accordé l'extradition.
L'article 16 fait obligation à l'État requérant, dès lors que l'État requis le lui demande, d'informer ce dernier des résultats des poursuites engagées contre la personne extradée.
Chaque Partie s'engage, conformément aux dispositions de l'article 17, à autoriser le transit à travers son territoire d'une personne faisant l'objet d'une procédure d'extradition entre l'autre Partie et un État tiers, sur demande écrite présentée par la voie diplomatique ou directement entre les deux ministères de la justice. Toutefois, les motifs de refus prévus à l'article 3 de la présente convention peuvent également être opposés à une demande de transit. De même, la Partie requise peut refuser le transit d'un de ses ressortissants. En cas de transit par la voie aérienne, l'autorisation préalable de l'État dont le territoire doit être survolé n'est requise que lorsqu'un atterrissage est prévu.
L'article 18 règle la question des frais de l'extradition qui, comme cela est d'usage, sont à la charge de la Partie requise lorsqu'ils sont exposés sur son territoire, tandis que les frais liés au transit sont à la charge de l'État requérant.
L'article 19 prévoit un mécanisme de consultation des deux Parties pour régler les éventuelles difficultés d'interprétation ou d'application de la convention, les deux ministères de la justice pouvant se concerter directement sur les procédures visant des cas particuliers ainsi que pour améliorer les procédures de mise en oeuvre de la convention.
L'article 20 fixe les règles d'entrée en vigueur et de dénonciation de la convention. Comme il est de coutume pour les conventions bilatérales conclues par la France, l'entrée en vigueur se fera le premier jour du deuxième mois suivant la date de réception de la deuxième notification de l'accomplissement des procédures requises par le droit interne de chaque État.
Telles sont les principales observations qu'appelle la convention d'extradition entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Corée, signée à Paris le 6 juin 2006, qui, comportant des dispositions de nature législative, est soumise au Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.
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