La France et le Japon sont actuellement liés par une convention en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu signée à Paris le 3 mars 1995.
Afin de combler un déséquilibre dans le traitement fiscal des cotisations sociales des salariés en détachement résultant de la signature d'un accord de sécurité sociale entre la France et le Japon, le 25 février 2005, il a été nécessaire d'amender la convention fiscale bilatérale.
En effet, à compter de l'entrée en vigueur de l'accord de sécurité sociale, les salariés japonais détachés en France pourront déduire de leur rémunération imposable l'intégralité des cotisations sociales versées au Japon en vertu de l'article 83-1°0 bis du code général des impôts. À l'inverse, en l'absence de dispositions équivalentes dans le droit interne japonais, les salariés français détachés au Japon verseront des cotisations aux régimes obligatoires français de sécurité sociale sans pouvoir les déduire.
Afin d'atténuer cette discordance, la France et le Japon ont décidé d'introduire une clause spécifique à la déductibilité des cotisations sociales dans leur convention fiscale. À l'occasion de cette discussion, l'ensemble des dispositions conventionnelles a été réexaminé.
L'avenant, complété d'un échange de lettres, a été paraphé à Paris le 26 juin 2006 et signé le 11 janvier 2007 à Paris.
La convention ainsi amendée permet non seulement d'atténuer la différence de traitement en matière de cotisations sociales mais également de soutenir l'essor des échanges économiques franco-japonais.
Les échanges commerciaux entre les deux pays ont progressé de près de 50 % sur la période 1993-2004.
Les investisseurs français détiennent 14 % du stock total d'investissement étranger au Japon. La France est ainsi devenue en 2003 le troisième investisseur étranger au Japon.
Le nombre de filiales d'entreprises françaises établies au Japon est passé de 220 en 1992 à plus de 600 à la fin de 2004. Elles émanent principalement de grands groupes : AXA, BNP-PARIBAS, L'OREAL, LVMH, MICHELIN, RENAULT, SAINT-GOBAIN, SANOFI-SYNTHELABO. Les petites et moyennes entreprises s'implantent également telles que les sociétés EUROPLASMA (environnement), GENSET (biotechnologies), ILOG (nouvelles technologies) et MARIAGE FRERES (agroalimentaire).
Le solde des échanges entre les deux pays reste déséquilibré en défaveur de la France. En 2005, nos exportations ont atteint 5,3 milliards d'euros alors que les importations françaises en provenance du Japon se sont élevées à 10,6 milliards d'euros.
Cela étant, les mutations en cours du système japonais (possibilités d'alliances industrielles, opportunités dans les secteurs tertiaires de la finance, des loisirs et de l'environnement) offrent aux entreprises françaises l'opportunité de conquérir ou de renforcer leur position sur le deuxième marché au monde.
Parallèlement, la France est le deuxième pôle d'investissements industriels japonais en Europe derrière le Royaume-Uni. La France accueille ainsi près de 400 filiales ou bureaux de représentation de sociétés japonaises, y employant 37 000 personnes.
Dans ce contexte, le projet d'avenant à la convention fiscale signé le 11 janvier 2007 doit consolider ces échanges croissants entre les économies française et japonaise.
II. - Principales dispositions :
Le projet d'avenant permet de moderniser la convention fiscale, en y intégrant les évolutions du modèle OCDE et en l'adaptant aux mutations récentes des échanges économiques entre les deux États.
Les dispositions suivantes méritent en particulier d'être relevées.
· Tout d'abord, de nombreuses dispositions favorisent les flux d'investissements entre les deux pays.
Ainsi, le champ d'application de la convention est élargi aux revenus transitant par des sociétés des personnes transparentes japonaises, auxquelles les investisseurs ont fréquemment recours.
De plus, l'avenant allège notablement la taxation des flux financiers :
- en matière de dividendes, le taux de retenue à la source passe de 15 % à 10 %, tandis que le champ d'application du taux réduit de 5 % est étendu. Enfin, les cas d'exonération sont élargis aux dividendes versés aux sociétés françaises détenant, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits de vote de la société japonaise les distribuant ;
- les intérêts demeurent soumis dans l'État de la source à un taux d'imposition de 10 % mais les cas d'exonération sont étendus aux revenus perçus par les établissements financiers (banques, assurances, sociétés de courtage) ;
- les redevances sont désormais exonérées de retenue à la source.
Enfin, les investissements réalisés par les fonds de pension japonais en France pourront désormais bénéficier des taux conventionnels de retenue à la source en matière de dividendes et d'intérêts. Cet avantage pourra bénéficier aux éventuels fonds de pension français qui pourraient être créés ultérieurement.
· Parallèlement, l'avenant renforce les moyens de prévention contre l'évasion et la fraude fiscales.
Des dispositions anti-abus, inspirées des commentaires du modèle de convention fiscale de l'OCDE, sont introduites en matière de revenus passifs et de revenus innomés. De plus, la France a accepté d'ajouter un article limitant le bénéfice de certains avantages conventionnels (exonération en matière de revenus passifs principalement) aux résidents satisfaisant à certaines conditions.
Certaines entités japonaises font l'objet de dispositions visant à éviter leur usage abusif à des fins fiscales. Les « pay through entities » sont ainsi privées d'une partie des avantages conventionnels en matière de dividendes (taux réduit de retenue à la source et exonération). Les revenus des « Tokumei Kumiai » (forme de société de personnes constituée en vertu de l'article 535 du code de commerce japonais) restent imposables en vertu du droit interne japonais sans pouvoir bénéficier d'élimination de la double imposition par la France.
Pour compléter ce dispositif, l'article relatif à l'échange de renseignements est modernisé et aligné sur les derniers standards de l'OCDE, tendant à une collaboration accrue des États.
III. - Portée de l'avenant :
Compte tenu des déséquilibres des flux entre les deux pays, l'allègement d'imposition en matière de dividendes et de redevances procure un avantage financier à la France : la perte des retenues à la source sur les flux en provenance du Japon est en effet plus que compensée par l'économie réalisée sur les crédits d'impôt imputables sur l'impôt sur les sociétés (IS) français à raison des retenues prélevées par le Japon sur les flux à destination de la France.
Par ailleurs, la déductibilité fiscale des cotisations sociales salariales est neutre pour le budget français. En effet, en ce qui concerne les salariés japonais détachés en France, l'avenant ne fait que reprendre le droit interne français qui les autorise d'ores et déjà à déduire intégralement leurs cotisations salariales versées au Japon sitôt l'accord de sécurité sociale franco-japonais entré en vigueur.
L'avenant atténue l'asymétrie fiscale en matière de cotisations sociales en insérant à l'article « pensions » de la convention fiscale une disposition permettant aux ressortissants français, envoyés en détachement au Japon, de déduire de leur revenu imposable japonais une part de leurs cotisations sociales salariales versées en France. La portée de cet article est explicitée par un échange de lettres.
Le champ d'application de cette déductibilité est proche de celui de l'accord franco-japonais de sécurité sociale : les seuls régimes obligatoires de sécurité sociale français (retraite et maladie) qui y sont mentionnés sont concernés. De plus, cette mesure ne joue que pendant la durée du détachement, limitée à soixante mois consécutifs.
Telles sont les principales observations qu'appelle l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Japon en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu (ensemble un échange de lettres) qui, comportant des dispositions de nature législative, est soumise au Parlement en vertu de l'article 53 de la Constitution.
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