Monsieur le Ministre,Monsieur le Président de l’Assemblée des Français
de l’Etranger,
C’est sur un ton quelque
peu badin que je rebondis sur les courriers que viennent de vous adresser mes
collègues Robert Denis Del Picchia, Sénateur des Français établis hors de
France, et Joël Doglioni, Conseiller élu à l’Assemblée des Français de
l’Etranger pour la zone Andine. Tous deux réagissaient à l’annonce que nous ont
confiée les Chefs de poste de nos circonscriptions respectives d’une forte
réduction des moyens mis à leur disposition par le Département pour organiser à
l’étranger la traditionnelle réception du 14 juillet. Qu’il faille réaliser des
économies, y compris dans le cadre de notre action extérieure, dans le contexte
budgétaire délicat qu’est celui de la France aujourd’hui, nul n’en conteste la
nécessité. Mais le choix de toucher, pour de relatives menues économies, à
cette célébration républicaine me paraît particulièrement mal venu.- En effet, la fête du 14
juillet, fête populaire par essence, est à l’étranger la seule véritable
occasion de l’année pour l’ensemble de la communauté française de se retrouver
et de croiser le personnel diplomatique et consulaire. La consigne donnée aux
postes de trier sur le volet les invités et de ne garder pour les ripailles que
les personnalités les plus « représentatives » risque en effet d’être
extrêmement mal vécue par tous ceux, sans culottes ou pas, qui resteront aux
grilles du château. Il ne leur restera peut-être plus alors qu’à regagner leur
chaumière pour regarder, par la petite lucarne de TV5 si jamais ils reçoivent
cette chaîne, le défilé militaire sur les Champs. Piètre façon pour eux de
célébrer leur Fête Nationale.- De plus, cette mesure va
à contre-courant de l’attention particulière portée par le Président de la
République au sort des Français de l’étranger qu’il ne manque pas, au cours de
ses voyages, de rencontrer lors de réceptions ouvertes à tous et pour lesquels
il a tenu à appliquer ou à initier de façon scrupuleuse ses deux promesses de
campagne à savoir la prise en charge des frais de scolarité et leur
représentation politique à l’Assemblée Nationale. Comment ces Français
comprendraient-ils alors qu’on veuille les priver de leur unique rendez-vous
annuel de convivialité et de communion républicaine ? Un bien sale coup donné
en fait aux « Equipes France » à l’étranger.- Mais encore, à l’heure où
la politique d’influence est le bon mot de notre diplomatie, il serait un peu
décalé de démontrer à nos partenaires et amis de tout pays, dont les élites
très francophiles sont toujours les hôtes de cette réception, que le pays de la
triade Liberté, Egalité, Fraternité n’a plus les moyens de fêter cette journée
de la Liberté en toute Egalité et Fraternité ! Notre pays peine déjà,
faute de moyens et en de nombreux endroits, à maintenir ou à construire ses
ambassades et ses écoles et nous n’aurions donc même plus aux yeux de nos
partenaires le loisir de fêter la République une fois l’an ! France
Eternelle, qu’es-tu donc devenue ?J’ai donc l’honneur,
Monsieur le Ministre, de solliciter votre bienveillance pour que soit revue
cette décision qui pour toutes ces raisons, et bien d’autres encore, me semble
mal tombée. Les Français de l’Etranger ont en tout domaine moins de droits que
leurs compatriotes de l’Hexagone ; ils se reconnaissent pourtant tous le
devoir d’être les meilleurs ambassadeurs de leur pays à l’étranger. Ils ont droit
à leur 14 juillet, on ne doit pas leur retirer. Parce qu’ils sont attachés à
leur devoir de réserve à l’étranger et parce qu’ils n’ont pas la possibilité de
battre le pavé Place de la Bastille, ils ne viendront pas au Quai d’Orsay
vous réclamer « le boulanger, la
boulangère et le petit mitron ». Ils veulent simplement, ce jour là, qu’on
leur laisse le pain, le fromage et le bon vin pour célébrer, comme à
l’habitude, leur République. Qu’ils soient ainsi entendus !Je vous prie d’agréer,
Monsieur le Ministre, d’agréer l’expression de ma très haute considération.
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